journal de bord (une tentative de cartographie de mes propres labyrinthes)

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17.10.02

je ne sais plus déjà de quoi ce site est né. c'était au mois de juillet. il pleuvait. j'étais seule à la maison. j'écrivais tout le temps. je construisais des labyrinthes.

toutes les pages de ce site ont été faites de nuit.

à l'origine je croyais savoir exactement ce que ce site allait contenir, et puis très rapidement je me suis rendue compte que c'était impossible, que ça fourmillait de partout, et puis aussi, surtout : que tout se recoupait. les mêmes images toujours hantent mon écriture : la mer, la nuit, l'enfance, le corps et la couleur, les bateaux, l'amour fou.

plus que tout il faudrait dire que ce site, comme tous les autres, je ne l'ai fait que pour moi. que longtemps trop longtemps je n'en ai révélé l'existence qu'à de rares amis, et puis à un moment je ne sais plus comment, la jeune andrinople a trouvé l'adresse et l'a divulguée sur son blog. au début je voulais lui demander de la retirer rapidement et puis j'ai pensé : oh, ça m'est égal.

c'est très difficile pour moi d'écrire dans le cadre de ce site parce qu'il me faut inventer un design tout nouveau et qui ne découlerait pas trop de celui du Journal. j'ai trop pris l'habitude d'écrire uniquement dans le Journal. sortir de ses limites me donne le vertige. si j'ai appris à apprivoiser l'espace du journal pour tout doucement pouvoir y prendre confiance et m'y écrire comme je le souhaitais, comme je pouvais me le permettre, je me suis aussi - force est de l'admettre - très largement enfermée dans ce même espace.

ouvrir un nouveau lieu d'écriture alors c'était comme se jeter délibérément au gouffre. j'étais perdue hors des cadres. ce sont les très belles photos de Benjamin Kiffel qui m'ont permis, comme la vague, de sortir des détails pour aller vers le rêve et ramener plus ou moins tout le site autour d'une certaine liquidité, surtout : lui donner sa couleur, lui donner son titre définitif.

ce soir je commence ce journal comme un journal de bord, un texte parallèle aux sept autres peut être et qui, plutôt que de vouloir inutilement les expliciter, les accompagnerait dans le même mouvement.

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01-11-02

la découverte assez récente du désordre de philippe de jonckheere est bien la seule chose qui ces temps-ci me donne l'envie de me remettre à l'élaboration de ces labyrinthes. plus que tout, le talent avec lequel il organise son désordre me donne l'envie, sinon le droit, de me laisser aller à faire des choses tout aussi brillamment bordéliques. ce que je voudrais c'est pouvoir faire un site qui suive le cours de l'écriture, le cours d'une réflexion, d'un certain chemin de soi. de fait, j'ai relié à mes propres écrits un certain nombre de textes d'auteurs qui m'ont toujours accompagnée, suivie, soutenue, énervée, nourrie. ces textes n'inspirent ni n'éclaircissent les miens, ils dérivent dans un sens qui me semble identique, c'est tout. on verra, à long terme, quel genre de soupe ça fait.

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13-11-02

très beau site de Corsario, volontairement calqué sur mon propre style de design, dont il m'envoie l'adresse ce soir, et qui me ramène à l'envie d'écrire dans ces pages.

je m'interroge sur ma capacité à créer un espace d'écriture qui serait un espace hors du temps et du monde comme je le souhaiterais.

rajouté en lien au texte nocturne la très étrange et envoûtante chanson de david sylvian : wave.

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le but ultime de ce site, s'il y en a un, est d'en faire un labyrinthe, mais un labyrinthe où l'on se retrouverait toujours. glisser de page en page devrait être naturel, et chaque page advenir comme une suite logique, alignée sur l'idée de la page précédente. hum. je voudrais qu'on puisse perdre son chemin et sa nuit sur ces pages, et ne plus jamais souhaiter en sortir. je voudrais qu'on puisse, au gré d'une recherche sur google ou d'un lien sur un site, venir s'échouer ici le plus naturellement du monde, et retrouver ses propres marques en chaque page. je voudrais, plus que tout, que ce site puisse devenir un de ces endroits que l'on se rend intime, où chaque phrase ne fait que rappeler ses propres phrases perdues, ses souvenirs oubliés. je voudrais que ce site ne se construise pas tant dans l'imaginaire du lecteur de ce que par ce que celui-ci découvre que de par ce dont soudain il se souvient.

vaste projet ! ce que je voudrais vraiment c'est qu'on puisse revenir à mes labyrinthes comme j'ai pu revenir tant de fois par exemple à la maison-page de jean-pascal : y chercher (et trouver) des raisons d'être apaisé, énervé, éternellement curieux du monde.

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16-11-02

scanné aujourd'hui : une photo en noir et blanc, le dessin que m'avait fait la petite Manon quand j'étais triste, les amoncellements de chiffres dont Lull envahit ses cahiers lorsqu'elle s'ennuie, et dont, me voyant m'étouffer de surprise, elle m'avait offert une page.

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20-11-02

il faudrait retravailler le texte des rêves liquides, en faire jaillir quelque chose d'autre qui est là tout à l'intérieur de moi, que je sens palpiter, mais que je ne sais pas encore dire. je sens sous mes paupières de grandes ailes palpitantes et qui se gonflent comme voiles au vent, je sens le langage qui va qui vient et qui fait le dos rond, je pense à cette petite fille blonde aux yeux fous dans ce film de Fellini, une petite fille toute douce qui joue avec un ballon, un ballon qui est la tête d'un homme, et cette petite fille douce effrayante qui est elle, sinon le diable ?

les rêves liquides, c'est un mélange de rêves, d'angoisses, de désirs et de peurs, c'est aussi, au delà même de la peur que ces rêves parfois m'inspirent, une espèce de soulagement délicieux dans l'acte de l'écrire, transformer le cauchemar dans le langage, déplacer le domaine de l'angoisse vers un réalisme magique et merveilleux, lourd de symboles, empreint d'une poésie qui est avant tout la cadence ralentie et radoucie de mon souffle en sommeil.

l'Ophélie shakespearienne perd la cohérence du langage à la mort de son père, elle perd aussi la cohérence de son propre corps à l'indifférence (feinte) d'Hamlet, par deux fois le mouvement intérieur qui la berce et la baigne est rompu et la nie à elle-même, les digues s'ouvrent en deux, la folie rentre en force, une fois disparu le mouvement du langage qui est aussi le mouvement du corps que reste-t-il sinon l'illusion de retrouver ce même mouvement intérieur perdu dans le long lit souple de la rivière, la liquidité infinie du rêve des algues et des branches mortes qui vont flottant doucement, comme une longue danse de mort (Salomé), comme une chanson (on pense à la chanson de Bérénice dans Aurélien)... : la jeune princesse O se jette à l'eau de la rivière.

l'écriture ne me semble jamais rien être d'autre que cette perpétuelle recherche du sens, du mouvement intérieur. je n'écris pas tant pour le sens que pour le long et merveilleux bercement du rythme, qui participe lui-même du sens en le faisant chanter sur telle corde plutôt que telle autre, tel rythme et telle cadence. l'écriture toujours recherche la cadence intérieure qui est celle du corps, du sens, de ce mouvement liquide et bouillonnant qui va courant en moi. flowing est un bon mot pour évoquer ce sentiment de liquidité intérieure, comme stream, ou encore flux.

en écrivant l'évènement de la vie quotidienne dans le Journal je restitue à l'évènement extérieur peut être un sens intérieur qui passe par la prise de ce rythme intérieur, coulant, délicieux et qui me berce.

dans l'amour plus que nulle part ailleurs cette longue ondulation du corps se trouve enfin révélée et puis peut prendre tout son rythme, elle est à la foix abandon et désir et volupté et aboutissement.

dans la danse, les voitures rapides lancées dans la nuit ou le galop d'un cheval je retrouve parfois le même sentiment de vitesse précise, de rythme régulier et qui pousse en avant, une nécessité intérieure qui est aussi celle du corps, de la rivière.

les rêves liquides pour moi ça sera toujours ce domaine étrange qui n'est déjà plus tout à fait celui du rêve pur, yeux clos reposant dans un sommeil plus ou moins souple, qui n'est pas encore celui de la rêverie que l'on dirige, que l'on influe à l'état de veille. les rêves liquides ça reste quelque chose qui mord un peu sur le rêve et beaucoup sur le langage, qui se nourrit avant tout de ce mouvement intérieur qui n'est peut être au fond rien d'autre que le courant sous-marin d'un inconscient perpétuellement tenté par le retour à la surface.

au fond, l'Ophélie de Shakespeare se laisse aller à l'eau parce que même dans les comptines inventées de sa folie elle ne trouve plus le moyen de prendre pied, le langage s'enroule autour et à l'intérieur d'elle comme ces fleurs aux longues racines qu'elle ramène à la reine, fleurs obscènes que sont ces dead men's fingers mais qui ne remplaceront jamais ni son père ni son amant, alors allant à la rivière elle se regarde dans la rivière comme je regardais parfois peut être tout au fond du lac Pavin, cherchant dans l'eau noire un duplicata de soi auquel se raccrocher dans ce miroir sans tain, un duplicata meilleur, un Narcisse qui aurait toutes les solutions, un espèce d'idéal de soi que l'on ne rejoint qu'en se laissant aller à basculer dans l'eau.

les rêves liquides (ça pourrait aussi s'appeller : l'appel des rivières) pour moi ça n'a jamais été que ça, le même pôle magnétique que le rêve, la maternité délicieuse de l'eau autour de soi. l'appel des rivières c'était : se laisser aller à marcher jusqu'à basculer dans l'eau, mais l'eau plus encore que la mort serait un retour au langage, un espèce d'absolu dans le langage : l'écriture.

je ne suis pas certaine que ce que je sois en train d'écrire ici soit pour autant clair comme de l'eau de roche mais...

l'appel des rivières c'était la volonté d'en finir déplacée sur un autre terrain, celui du langage, de la même liquidité du langage, c'était la volonté de se supprimer du monde remplacée par le désir de se réinventer selon d'autres systèmes : ceux des mots seuls.

l'appel des rivières témoignait alors à la fois du chant de sirène qu'est la mort parfois et puis aussi de l'écriture. doucement j'utilisais mes crises de rage et de fureur - ces crises mêmes que j'appelais mes heures sanguines - en en faisant mon propre carburant, mon propre moteur, et je cherchais dans l'écriture non pas à me sauver d'une fin certaine, d'un réel basculement dans l'eau, mais au moins à réorienter la rage et la douleur vers autre chose, la très banale opération dite de sublimation.

(quoi, tout ce blabla pour en arriver à une telle banalité, freudienne de surcroît !)

" l'immédiate, c'est la jeune fille en moi qui s'en va à la mer parce qu'elle est en souffrance de ne plus rien sentir... "

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23-11-02

l'absence

ce texte quand je l'écrivais pour vous, je l'avoue, je l'écrivais pour moi aussi. c'était un mois d'août à Paris. Hélène était triste et je la plantais devant son ordinateur en lui disant : travaille. je travaillais aussi. on écrivait des pages et des pages côte à côte, de temps en temps je me levais pour aller faire du thé, tourner le vieux vinyl glacé (très vieille édition de La Frime de Ferré). d'autres fois je restais assise des heures et des heures à vous écrire, au petit matin j'allais me coucher exténuée. je me souviens que je lisais Vie Secrète de Pascal Quignard, je trouvais le début très bon, très bien ficelé, et puis après partant dans ses délires habituels il me perdait très vite en cours de route, ça me mettait très en colère ça, que le livre ne suive pas le chemin que je lui avais déjà inventé en somme, qu'il noie la trame poétique au profit de ses théories étranges sur la vie, le langage, la musique, des choses bien pensées oui, mais qui m'ennuyaient. et j'avais peur pareillement d'être quelqu'un qui pourrait ennuyer. je le suis sans doute, parfois, mais alors c'est que le coeur n'est pas là, c'est tout, et ça arrive.

c'est un peu délicat - je m'en rends bien compte - ces liens hypertextes qui partent dans tous les sens, du texte de l'absence soudain on se retrouve sur la ballerina session de marylin monroe avec milton greene, les photos sont formidables mais l'on n'a pas bien compris pourquoi, pourtant il faudrait qu'en fin de compte on puisse glisser de texte en image en musique comme ça, en étant tout entier dans la cohérence d'un monde à explorer (qui est mon monde, rien que ça). c'était un mois d'août à Paris et on allait voir tous les vieux films de marylin à l'action écoles, rue des écoles. c'était un mois d'août à Paris et le succès de Paris-Plage remplissait tous les journaux. tard le soir sur Arte un vieux documentaire évoquait l'anniversaire de la mort de marylin monroe, je restais glacée devant la pureté des photos de milton greene, je commandais sur Amazon le très étrange bouquin de Joyce Carol Oates intitulé : Blonde, qui s'avéra épouvantablement décevant. le reste du temps, je vous écrivais.

il y a encore des liens à faire à partir de ce texte. j'en ai fait un vers Sappho sans trop savoir pourquoi d'abord, et puis je me suis rendue compte que c'était à cause de cette peinture de Gustave Moreau sur la mort de Sappho à Leucade, l'étrange manière dont la poétesse semble flotter, on ne saurait dire si elle repose sur le sol ou bien sur l'eau, son corps jeté dans la furie de la falaise et pourtant flottant elle semble dormir, les yeux clos comme visitant un autre monde de rêves et de chimères plus encore que visitant la mort. la limite du langage, le refus du corps de l'autre, le suicide, l'eau, c'est peut être une conclusion hâtive que de ramener Sappho à Ophélie sur ces seuls éléments mais ce qui me trouble tant et pourtant, c'est bien ce même sommeil de rêves sous les yeux, ces personnages un peu borderline qui, d'être trop douloureusement dans un moment et les limites de ce moment, cèdent à l'appel de l'infini du vide ou du miroir de l'eau.

des personnages qui cherchent à tout prix à appartenir ?

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30-02-03

longtemps après. j'ai repris ce soir le texte de l'enfant pour en faire une première et sérieuse mouture (mot horrible). il y aura bientôt un lien public vers le texte à partir de l'index. également vers le texte de l'absence. je voudrais bien m'attaquer au texte de la ville mais c'est un gros morceau d'errances et de souvenirs. je garde le texte du soleil tragique pour un jour où j'aurais envie de revoir le Mépris. le soleil tragique pour moi ça sera toujours deux choses : Bardot dans la villa Malaparte à Capri d'une part, l'été de mes quinze ans en Grèce d'autre part. c'est d'ailleurs à peu près à la même période que j'ai vu le Mépris pour la première fois. je l'avais emprunté à la médiathèque. je n'ai strictement rien compris. cet été là j'ai appris l'amour fou et la mélancolie. bon.

j'écoute japan, ryuichi sakamoto, david sylvian solo. j'aime les types glamour androgynes qui parlent anglais et se maquillent les yeux. rien que ça.

j'ai écrit toute une part de la journée et jusque très tard dans la nuit (il est presque quatre heures du matin). à un moment tout à l'heure en mettant le point final à un texte j'ai ressenti encore ce grand désarroi de fin d'euphorie. après l'instant d'écriture (qui peut durer des heures, peu importe) l'euphorie retombe comme la fin d'une drogue. la tristesse revient à flots. il y une phrase de Quignard qui dit très bien ça dans un de ses insupportables et brillants petits bouquins (les tablettes de buis d'Apronena Avitia, je crois). il parle de la fin de l'acte d'amour, des corps qui se séparent, de la très légère tristesse qui s'empare un moment du corps fatigué, de son retour à réalité. c'est L qui m'avait fait remarquer ce passage. elle le trouvait très approprié. il ne me semblait pas avoir jamais ressenti cela après l'amour. après l'écriture oui, c'est certain. la plaie merveilleuse, toujours.

cet après-midi j'ai relu quelques pages de Duras et également plusieurs pages du Mausolée des amants d'Hervé Guibert. ce sont des livres qui me donnent la force d'écrire, je ne saurai dire pourquoi. ce sont des livres qui soutiennent le désir fou, fulgurant d'écriture. autant la "littérature contemporaine" lorsque j'ai le malheur de tomber dessus me dégoûte profondément de moi-même et de mon écriture, autant ce qui s'écrit ou plutôt se ressasse et se montre aujourd'hui me fatigue et m'ennuie, donc, autant Duras, Guibert, Woolf ou Katherine Mansfield, avec Deleuze et avec d'autres, tout en vrac, sont pour moi des appuis intérieurs rares, de ce que l'on pourrait presque appeler : des alliés à la vie.

c'est une sorte d'éducation que je me fais à moi-même peut être de me donner une ligne de conduite si dure et exigeante : pas de temps à perdre sur ce qui ne me nourrira pas.

je ne veux que les livres qui vont changer quelque chose en moi. le reste n'est pas même de la décoration, car la décoration est importante, le reste tout simplement n'existe pas.

alors, publier cet espèce de journal de bord, de journal parallèle aussi dans le cadre des labyrinthes de la jeune fille et la mer ? pourquoi pas.

de même - tous ces liens dans tous les sens ne me satisfont pas. ils ne servent ni mes textes ni ceux classiques et modernes que j'aime et que j'admire. j'ai une petite idée pour ce qui est de résoudre ce problème. Jean-Pascal l'a eue en même temps que moi, il est très fort ce Jean-Pascal (oui, bon, j'adore Jean-Pascal, quoi) : ça s'appelera : les chemins de traverse.

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23-06-03

fini hier le texte de l'enfant. je n'en suis pas satisfaite vraiment, mais j'ai idée que c'est tout à fait le genre de texte qui a besoin de mûrir.

retiré l'absence. mes lettres d'amour ont-elles vraiment leur place ici ?

travaillé toute la nuit jusqu'à l'aube aux rêves liquides. quelque chose de très puissant me poussait. j'ai passé le reste de la nuit et de la journée dans un état de fatigue immense. on dirait que quelque chose prend forme enfin, mêlant en vrac et si longtemps après le rêve du garçon aux cheveux noirs, le rêve de la peur des montagnes, le rêve de la fille blanche en turquie, et puis les mouettes et puis la mer et toute la nuit.

il faut du temps.

j'ai également rectifié nocturne. les liens extérieurs sont retirés, ne reste que la musique de David Sylvian.

cela fera bientôt un an que j'ai créé ce site.

à l'époque j'avais un mal fou à écrire en dehors des cadres sages et précis du journal, je traînais dans la ville avec toutes mes tristesses, l'été brûlant me prenait à la gorge, j'avais vingt-et-un ans et je ne voulais pas perdre un seul instant. j'étais malade, beaucoup, je restais à l'abri du vent et de la vie dans ma grande maison calme avec les fenêtres fermées à la pluie. la fièvre me rendait folle. je m'évanouissais dans les escaliers. j'avais perdu mon amour fou et puis soudain tout m'échappait.

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27-07-03

je remanie encore. les ébauches de texte pour le soleil tragique ne me satisfont pas. quelque chose s'est instillé doucement dans ce site, qui m'y refuse la lumière vive.

j'ai un petit peu le sentiment de construire ce site comme on ferait d'un disque : importance du titre, travail à l'unité et la cohérence des textes et des couleurs, de leur enchaînement, souci de ce qui ressemble fort à une sorte de tracklisting...

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21-08-03

le départ. le titre ne convient pas mais l'idée est là depuis trop longtemps. fuir à tout prix ? s'en aller en avant. les mots viennent tout en vrac.

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01-09-03

parfois, il faudrait écrire comme on filme.

le départ s'appellera l'échappée belle.

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12-09-03

après un long mois de silence je remets à jour le journal et puis je remets en ligne les différents textes de ce site qui dormaient en silence - l'enfant, la première partie des rêves liquides, la version light de nocturne, l'esquisse de et toi.

j'ai encore dans les yeux la couleur infinie de H Story - impossibilité de parler, de communiquer, de dire l'histoire, de la saisir, impossibilité d'être là à Hiroshima et de filmer encore Hiroshima après Resnais, après tout ça. on parle beaucoup des camps de concentration, on en dit la douleur et tant mieux, cette douleur là ne sera jamais assez dite, mais qu'a-t-on jamais réellement dit des corps brûlés d'Hiroshima et Nagasaki ? on ne parle jamais de l'horreur des vainqueurs.

deux mois que je me sens en création et puis que rien ne vient vraiment, je n'en suis pas fâchée pour autant, je suis en joie et en langueur.

partout sur internet je crée des espaces libres où venir m'échouer, au hasard. je n'ai pas de domaine et je n'ai pas de limites. je crée des pages sans cesse comme d'autres dorment ou s'en vont. je veux être partout à la fois et puis jamais là où l'on s'y attendra. le blog m'énerve - il faut n'être d'aucune mode. qu'ils s'engorgent tous de leurs cancans, leurs effarouchements de vierges folles, moi j'ai envie d'écrire, de filmer, de faire des pages sans lien et puis sans intérêt, de parler de la nuit, des coeurs carmins, de la folie, l'hystérie érotique, le corps et la jouissance, la mer, la mort, la beauté des images, des livres de Gracq, de Mandiargues, des haikus anciens, de kubla khan, de Salomé et d'Ophélie, de Sappho, des toiles de Staël ou de Moreau, de l'impossible, de l'intouchable, de l'infinie fureur de vivre.

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14-03-04

du Japon, bout du monde, je reprends la construction de ce site. deux ans, déjà.

j'ai voulu aller trop vite sur les années. le départ, l'échappée belle ne peuvent pas exister sans l'attente.

il faut poser les pierres du rêve d'abord pour pouvoir ensuite voyager.

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15-02-05

presque un an depuis la dernière fois que j'ai travaillé à ce site. deux ans et demi depuis que je l'ai créé.

une langue encore, un pays différent, l'Océanie liquide.

l'histoire du site de "la jeune fille et la mer" est terminée.

c'était un rêve immense, bleu marine, battu de vent et de la mélancolie la plus douce.

c'était le rêve de la tristesse (nocturne), de l'hystérie érotique (la jeune fille et la mer), du suspends amoureux (l'attente), du corps dans la ville (la ville amoureuse), c'était le rêve exaucé du désir (rêves liquides), le rêve du cheminement souterrain et confiant (l'enfant), jusqu'à toi.

il est temps maintenant de changer d'univers. la tristesse est tombée, elle s'est vidée entière dans le ventre de l'écriture : une ferveur nouvelle est née.

un nouveau site aussi.

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04-10-2007

on me rappelle l'existence de ce site.

j'ai retiré il y a longtemps déjà la ville amoureuse que je n'aime plus (ni la ville, ni le texte).

à la place : un lien vers ce texte étrange et lancinant : immense la bête en ma poitrine.
un texte pour Cécile aux yeux de Dora Maar, un texte pour dire l'appel de la mer, la sueur des bouges des ports, la goélette du rêve sous laquelle dort une bête immense et malicieuse dont les crocs me retournent.

l'attente n'est toujours pas terminée.

un autre site était en construction : je ne suis plus sûre de voir l'utilité ou l'intérêt de jeter en pâture sur internet les morceaux d'écriture qui me viennent au bord tout au bord du coeur.

tout est vitrine commerciale désormais sur internet. je ne sais plus quoi faire de mes météorites.

O.

 

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